Fermeture des grives en février

L'action équivoque de l'A.N.C.E.R.

 

 

Une réplique cinglante de l'I.M.P.C.F. des techniciens nationaux et fédéraux. À toute la chasse française d'organiser la riposte. L'A.N.C.E.R. (Association nationale pour une chasse écologiquement responsable) vient une fois encore de prouver son caractère trouble, équivoque.

 

Si certains d'entre nous la considéraient depuis longtemps déjà comme une "cinquième colonne", infiltrée dans les rangs de la chasse par le mouvement écolo anti-chasse, il semble bien que les faits leur donnent aujourd'hui raison une fois de plus.

En effet, cette association de "chasseurs", "choisie", "élue" (comme ceux qui seront habilités à accéder un jour au Paradis, aux Champs Elysées, au Walhalla par grâce divine) par... Mme Voynet, l'ex toute-puissante ministresse de l'Environnement, pour siéger au sein du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (en vertu de quelle représentativité, sinon en récompense de bons et loyaux services rendus à une ministre anti-chasse notoire ?)  s'est singularisée ces dernières semaines en demandant au ministre de fermer la chasse des grives le 31 janvier.

 

Obligation de riposte

 

Une fois encore des "chasseurs" battent leur coulpe, demandent des restrictions accrues pour la pratique de leur (?)/notre passion.

Ça suffit ! Il faut désormais qu'ils supportent les conséquences de leurs actes. Nous avons pêché, frères chasseurs (!), par excès de bienveillance vis à vis de ceux qui n'hésitent pas à tuer la chasse française. Nous nous sommes jusqu'ici trop souvent rendus coupables de passivité.

Pourquoi, à notre tour, n'attaquerions nous pas, tous ensemble, ces tenants de la brimade permanente ? Pourquoi ne pas les mener devant les tribunaux pour mensonge, falsification, pour le préjudice qu'ils nous portent ? Il est temps que ceux qui nous dirigent usent des mêmes armes que nos adversaires. Il faut même faire donner contre eux la "grosse artillerie", sinon nous continuerons à passer pour les nullards qu'on présente en permanence aux yeux de l'opinion publique.

Et puis, ne pourrions nous pas refuser, partout dans nos A.C.C.A. ou A.I.C.A., à ces messieurs de l'A.N.C.E.R, qui doivent bien chasser tout de même sur quelques territoires (à moins qu'ils ne chassent sur des propriétés privilégiées où ne s'appliquent pas les règles qu'ils préconisent pour les autres !), toute carte de société de chasse leur permettant de pratiquer leur/notre sport ? Cela nous semble tout à fait réalisable. S'ils sont chasseurs malgré tout, cela pourrait avoir peut-être sur eux un certain impact...

 

Le tour d'escamotage de l'A.N.C.E.R.

 

Une note de cette association bidon mais reconnue par conséquent, note infondée, étayée sur rien, est en effet à l'origine de l'interdiction de la chasse des grives en février.

 

Les plus éminents chercheurs, parmi lesquels ceux de l'I.M.P.C.F. (Institut Méditerranéen du Patrimoine Cynégétique et Faunistique), que dirige Jean-Claude Ricci, dénoncent une flagrante hypocrisie, pis une falsification avérée. Il y a bien des années en effet que l'I.M.P.C.F. mène sur les grives une étude, un suivi permanents sur lesquels nous reviendrons en détail dans une prochaine Gazette, dès que le caractère brûlant de l'actualité cynégétique de ces dernières semaines se sera un peu estompé.

Alors, lorsque l'A.N.C.E.R., dans la note qui a motivé le retrait par le M.A.T.E. des grives des espèces chassables en février, avance que le prélèvement a considérablement baissé entre 1983-84 et 1998-99 (-80% selon elle) et qu'elle extrapole de cela une diminution des populations, on ne peut que rester pantois devant tant de mauvaise foi, d'incohérence, de légèreté. L'A.N.C.E.R. a joué au prestidigitateur, a berné les décideurs du ministère, (de

connivence avec eux plutôt c'est évident), en escamotant quantité de paramètres essentiels.

Elle ne s'est en effet semble-t-il même pas penchée sur la raréfaction... non pas des grives, mais des chasseurs dans l'intervalle, puisque notre nombre a chuté de presque un million, passant de 2,5 millions à 1,6 million. Elle ne s'est pas posée non plus la question sur la réduction du temps de chasse avec, notamment, la perte du mois de mars. N'évoquons aussi que pour mémoire les limitations que les chasseurs s'étaient eux mêmes infligé et qui pouvaient aller jusqu'à deux voire trois jours de non chasse par semaine, avant l'instauration du jour de non chasse du mercredi. Elle a aussi "oublié" encore les évolutions de la chasse française, avec l'émergence des grands gibiers et la réorientation de quantité de chasseurs "à la billebaude " vers ces mêmes grands gibiers (chevreuil, cerf, sanglier). Elle n'a pas tenu compte des possibles variations migratoires d'une année à l'autre, variations parfois très importantes comme y assistent cycliquement les chasseurs de palombes par exemple.

 

Ouvrons ici une parenthèse. Voici deux ou trois ans, certains "devins" d'un rare pessimisme (toujours les mêmes qui veulent restreindre encore et toujours la chasse) n'annonçaient-ils pas la possible disparition du pigeon ramier, après une année de pause dans la migration ? Alors que l'automne 2001 a permis de voir des "palombes" comme en n'en avait plus vu depuis quinze ans, on mesure combien la comparaison entre deux années différentes peut conduire à des affirmations péremptoires mais complètement erronées.

Voilà donc comment l'A.N.C.E.R., groupuscule qui a versé dans le clan des anti-chasse, a obtenu l'oreille du M.A.T.E.. Désolant, scandaleux et témoignage aussi de la légèreté et du parti pris d'un ministre qui n'a plus aucune légitimité à occuper le poste auquel il a été nommé.

Suite à la note partisane (voire "échangée" à l'A.N.C.E.R. contre son admission au C.N.C.F.N.) Jean-Pierre Arnauduc, de la F.N.C., Jean-Claude Ricci, de l'I.M.P.C.F. et Jésus Veiga, de la F.D.C. de Gironde, personnalités aux compétences techniques reconnues, ont riposté en démontant point par point les arguments de l'A.N.C.E.R. dont on se demande sur quelles bases techniques et grâce à quels "spécialistes", elle se permet de peser aussi lourd sur la chasse française toute entière alors que son poids réel est celui d'un duvet d'eider. Notons que les "spécialistes" de l'A.N.C.E.R. ont réalisé leur propre exégèse de données collectées par l'O.N.C.(F.S.).

 

Voici la réponse des scientifiques du monde cynégétique qui démontre une fois encore que nous sommes toujours contraints de nous défendre. Mais quand, grands dieux, sortirons-nous de cette situation de victimes expiatoires, de défenseurs d'un camp retranché pour contre-attaquer et laminer à notre tour ceux qui n'ont que cette idée fixe en tête vis à vis de nos pratiques ?

 

Commentaires sur la note de l'A.N.C.E.R.

 

Concernant cette note, les scientifiques cynégétiques n'hésitent pas à dénoncer "abus et erreur scientifique manifestes; le postulat posé est faux - l'analyse des tableaux de chasse n'est pas un moyen, et surtout pas un moyen efficace d'estimer l'évolution démographique des espèces. Cet abus initial rejaillit sur l'ensemble de la note, qui est fondée sur ce postulat.

 

* En effet, il est scientifiquement bien connu que le tableau de chasse (et ses variations) est sous l'influence de multiples facteurs: pression (ou effort) de chasse, conditions climatiques, modifications réglementaires, effectifs de gibier, etc.

* En assimilant évolution du tableau de chasse et évolution des effectifs des populations, sans étudier la part respective des autres facteurs influençant le tableau de chasse, l'A.N.C.E.R. commet donc une erreur méthodologique sur le plan scientifique.

* Dans le cas d'espèce, à savoir la comparaison des enquêtes 1974-75, 1983-84 et 1998-99, l'ANCER commet deux autres approximations.

* En effet, d'une part, l'enquête 1974-75 n'a pas été menée selon la même méthodologie que les deux autres - il ne peut donc y avoir comparaison.

* D'autre part, le tableau donné pour 1998-99 (4.537.960) oublie celui du merle noir, lequel était inclus dans le tableau de 1983-84 (13.182. 000) (N.D.L.R. : un "oubli" bien singulier en vérité et qui témoigne de manière éclatante que la "rigueur" scientifique n'est pas du côté de l'A.N.C.E.R.).

* De plus, pour des espèces soumises à de fortes variations annuelles de leurs effectifs, comme les grives, il est très difficile d'utiliser des données ponctuelles à 10 et 15 ans d'intervalle.

* Ainsi l'O.N. C.F.S, qui a réalisé ces 3 enquêtes de tableaux de chasse, a toujours précisé dans les publications des résultats, les limites méthodologiques à leur utilisation comparative d'une part, et à leur utilisation pour estimer l'évolution des populations d'autre part:

 

* Ce type d'enquête nationale est à utiliser pour des objectifs sociologiques. Le suivi régulier de l'évolution des populations animales réclame d'autres dispositifs (Gibier faune sauvage - vol 3 - Sept 1986 - "Enquête sur les prélèvements petit gibier durant la campagne 1983-1984 en France métropolitaine. Méthodologie utilisée").

* Sauf à être renouvelé beaucoup plus régulièrement, ce type d'enquête ne permet pas de savoir si l'évolution des prélèvements à quinze années d'intervalle reflète l'évolution des effectifs des espèces. Beaucoup de facteurs entrent en jeu. -(Faune Sauvage - Cahiers techniques - Août/septembre 2000. Enquête nationale sur les tableaux de chasse à tir - Saison 1998-1999).

* Parfois même, les tableaux de chasse peuvent diminuer alors que les populations ont augmenté : c'est le cas de la foulque entre 1984-85 et 1998-99. ("Faune Sauvage Cahiers techniques " - Août/septembre 2000 - Enquête nationale sur les tableaux de chasse à tir - Saison 1998-99 page 152-156)

* Dans le cas spécifique des grives, les auteurs de l'enquête 1998-99, ne concluent nullement à une diminution des populations de grives, ils avancent plusieurs hypothèses pour expliquer l'apparente diminution des tableaux de chasse, sans pouvoir trancher scientifiquement, du fait des limites méthodologiques de ce type d'enquête.

 

Parmi ces hypothèses:

* diminution du nombre de chasseurs (- 32 % en 25 ans);

* modification éventuelle des escales migratrices et de voies de migration (N.D.L.R : le meilleur exemple  de ces changements migratoires parfois soudains et spectaculaires est à trouver chez le pigeon ramier qui a délaissé totalement certaines zones migratoires des Pyrénées qu'il fréquentait naguère assidûment par exemple) ;

* modification et évolution des conditions climatiques

* Etc.

 

Ils en concluent: "cette enquête ... ne permet pas de tirer de conclusions fiables sur l'évolution démographique de leurs populations en raison du caractère isolé de ces données. Une enquête annuelle serait une condition minimale pour s'avancer à émettre des  hypothèses dans ce domaine" (Faune Sauvage - Août/septembre 2000- page 92)

* Enfin n'oublions pas qu'en plus de la diminution du nombre de chasseurs déjà évoquée (- 32 % en 25 ans), la saison de chasse a fortement diminué aussi entre 1975, 1983-84. et 1998-99: suppression de la chasse en mars et partiellement en février. De plus, quelques départements ont pris des mesures volontaires de limitation du tableau de chasse avec des P.M.A. (Alpes Maritimes, Dordogne, Pyrénées Orientales ... )

* Il n'est pas inutile de rappeler que les quatre espèces de grives et le merle noir sont classées en état de conservation favorable (Birdlife 2000) et que le niveau encore très important de leurs effectifs est largement de nature à supporter les prélèvements effectués en France (1,4 % à 1,6 % de la valeur médiane des effectifs européens) (*)

 

En conclusion, l'A.N.C.E.R. énonce deux affirmations abusives, car non suffisamment étayées sur le plan scientifique :

*  Les populations de grives sont en baisse

En fait les enquêtes tableaux de chasse n'autorisent pas cette conclusion hâtive.

 

* Si baisse il  y a, c'est la chasse qui en est responsable

En fait: aucun élément scientifique ou donnée chiffrée n'est donné dans la note A.N.C.E.R. pour appuyer cette affirmation, seules des hypothèses théoriques sont émises .

 

Jean Pierre ARNAUDUC

Jean Claude RICCI

Jésus VEIGA

 

(*) Selon la publication du Bird Life International (2000 - Européen bird populations : estimates end trends) les effectifs reproducteurs de ces espèces en Europe se situent entre 56 et 127 millions de couples (38 pays) ; sur la base de ces estimations et en considérant une production moyenne de 2 jeunes par couples, on peut évaluer les effectifs européens de ces espèces entre 222 et 509 millions d'oiseaux avant le départ en migration. Les prélèvements moyens réalisés en France (source O.N.C.F.S./U.N.F.D.C. 2000. Prélèvements nationaux 1996/1999) représentent donc 1,4 à 1,6%.

 

Source : la gazette officielle de la chasse et de la nature