CHASSER AU PRINTEMPS

En Europe, c’est possible !

Source RNC

Aprés 22 ans d'âpres discussions entre les représentants français des chasseurs de migrateurs, le gouvernement et la Commission européenne, l’étau se resserre inexorablement sur les chasses printanières dans l’Hexagone. D’autres pays membres de l’Union européenne ont réussi à maintenir leurs traditions, malgré un cadre juridique identique, sans oublier les pays candidats.

Gros plan sur ces exceptions cynégétiques, mais surtout politiques. 

L’Union Européenne est un fabuleux territoire de chasse, où les chasseurs peuvent vivre leur passion toute tannée sans avoir à raccrocher leur fusil (ou leur carabine). Avec plus de vingt espèces chassables entre le 1er février et le 25 mai – sans tenir compte des corvidés ; laridés et nuisibles - la chasse en Europe au printemps est une réalité. Néanmoins,  pour les oiseaux migrateurs, il ne faut pas s’enflammer et regarder les données de près. En effet, il n’y a guère que la Grèce qui chasse les canards jusqu’au 28 février, ce qui lui vaut une attaque en règle de la part de la Commis­sion européenne. Au Royaume-Uni, les canards et les oies sont chassés jusqu’au 20 février mais uniquement sur le Domaine Pu­blic Maritime. Le pigeon ramier est chassé au printemps dans sept pays membres de l’UE, ceci étant a mettre en relation avec les dégâts causés aux cultures en cette saison. Les grives sont chassables jusqu’à fin fé­vrier au Portugal et en Grèce. La bécasse est chassable en février en Espagne (fermeture le 4) et en Grèce (fermeture le 28), la première place dans la course aux traditions étant détenue par l’Autriche, où la mordorée est chassée à la croule en mars et en avril *.

Les débats agitent essen­tiellement la chasse aux oiseaux migrateurs, en raison d’un déficit chronique à connaître l’état de conservation des po­pulations, mais aussi à défaut de pouvoir définir précisément le début du trajet de retour, durant lequel il est interdit de chasser. Mais la directive Oi­seaux interdit la chasse durant la période de nidification, pen­dant les différents stades de re­production et de dépendance. Or, ces considé­rations concernent aussi les oi­seaux sédentaires. La plupart des pays membres n’autorisent pas la chasse de printemps aux oiseaux sédentaires, mais le fai­san est chassable en Finlande jusqu’au 28 février, la perdrix en Espagne jusqu’au 4 février, le lagopède des saules jusqu’au 31 mars en Finlande et 15 mars en Suède, le lagopède alpin jus­qu’au 15 mars en Suède. Les chasseurs autrichiens, eux, chassent les grands tétras et tétras lyre sur les places de chant, au mois de mai. Pour l’instant, il semblerait que ça ne pose pas de problème à la Commission européenne, car ces pays ont mis en avant le bon état de conservation des populations d’oiseaux concernées.

Les oiseaux ne sont pas les seules espèces chassables au printemps, le petit et grand gi­bier à poil l’est aussi. Le lapin est chassable toute l’année dans trois pays, en raison des dégâts commis, et le lièvre est aussi chassable dans trois pays, dont  la Finlande et l’Irlande, qui autorisent sa chasse jusqu’a fin févier. Pour les ongulés, il faut souligner le nombre important de pays qui prolongent la sai­son de  chasse en février, mars, voire avril dans le but de limiter les populations qui explosent  partout en Europe. La chasse du brocard (à l’affut ou à l’approche), est une tradition, pratiquée dès la mi-­mai dans 6 pays de l’Union européenne, avec une ouverture au 1er mai en Suède et au 1er avril au Royaume-Uni. Les chasseurs français (dont une partie pra­tique déjà cette chasse) risquent d’attraper également la fièvre du brocard de printemps, chasse discrète qui procure beaucoup de sensations et fait couler si peu de salive.

Pour les chasseurs à la re­cherche de chasses hors du commun, deux pays de l’UE offrent des espèces excep­tionnelles. la Finlande autorise la chasse du lynx jusqu’à fin février celle du loup jusqu’au   31 mars, celle du phoque jusqu’au 1er avril et celle du castor jusqu’ au 30 avril. En Suède, le castor est chassable jusqu’au 15 mai. L’état de conservation de ces espèces est assez bon pour supporter des prélèvements, là aussi avec l’aval des autorités nationales et eu­ropéennes, ce qui est encoura­geant pour les Français.

Pratiquer la chasse au prin­temps est loin d’être un tabou dans de nombreux pays membres de l’Union. Si certains sont en proie aux tracasseries juridiques des institutions européennes, force est de constater que, dans la plupart des cas, tout se passe bien. A ce groupe de pays dont les chasseurs ont su préserver leurs traditions, viennent s’ajouter aujourd’hui les pays candidats à l’adhésion. L’entrée de ces pays dans l’Union européenne, ne représente pas seulement des opportunités de voyages cynégétiques facilités par l’appartenance à un même bloc politique, mais surtout la remise en question du dogme selon lequel des espèces comme les grands prédateurs sont intouchables.

Philippe Jaeger

* La bécasse à la croule, une tradition autrichienne 

À l’Ouest, les cieux ne sont plus qu’un brasier ardent, des bouffées d’air tiède  remontent de la vallée et les grives musiciennes chantent à tue-tête. Alors que les première étoiles apparaissent, un petit grondement sourd retentit dans le ciel. Soudain, l’oiseau apparaît au-dessus des arbres et s’engage dans un axe rectiligne qui longe la lisière. Un coup de feu claque et le munsterlander s’élance dans le sous-bois. Déjà les hulottes ont remplacé les grives, il est temps de rejoindre la vallée pendant que, dans la nuit, se poursuit la croule. Aussi loin que se souviennent les chasseurs autrichiens, la bécasse a toujours été chassée à la croule au printemps. Quand leur pays est entré dans l’Union européenne, il était hors de question d’abandonner ce mode de chasse, qui pourtant avait tous les attributs pour rester accroché dans les filets de la Commission européenne. Les juristes de la fédération des chasseurs autrichiens, à l’aide des données transmises par les chasseurs, ont défendu le dossier à Bruxelles, où cette chasse a été jugée conforme aux dérogations prévues par l’article 9 de la directive Oiseaux. En effet, les prélèvements autrichiens représentent chaque année environ 4000 oiseaux à la croule, 90% des oiseaux étant des mâles. Le principe de capture sélective et en petite quantité, dicté par la directive, est donc respectée.