Les ACCA et la gestion du
petit gibier
Les
ACCA constituent une structure essentielle de la chasse française et à ce
titre, reflètent assez exactement ses qualités et ses faiblesses. Dans quelle
mesure sont-elles capables de résoudre un problème aussi fondamental et
complexe que la gestion du petit gibier naturel ? A travers 4 exemples,
les ACCA démontrent qu’elle n’ont pas dit leur dernier mot, et que la volonté
collective des chasseurs permet des réalisations exemplaires.
Dès 1989, dans l’Ariège, les chasseurs ont voulu remédier à la baisse des populations de lièvre en créant un GIC autour du Mas d’Azeil, regroupant 7 A.C.C.A., soit 11000 ha. dans le Piémont pyrénéen. À l’époque, la population globale, évaluée par comptage au phare, se montait à 53 lièvres. Une opération de lâcher massif de lièvres originaires d’Europe Centrale a donc été entreprise sur 3 ans, associée à une interdiction de tir. Mais - et c’est là que se manifeste l’originalité de l’entreprise - la chasse aux chiens courants restait autorisée, ce qui permettait de conserver la motivation des chasseurs locaux, dont les meutes auraient autrement été condamnées au chômage technique. il faut savoir en effet que le Mas d’Azeil est un haut lieu du chien courant, avec un brevet de chasse célèbre, et que le président du GIC, Alain Gaychet, et son frère Roland sont des éleveurs réputés. Dès 1993, les premiers prélèvements ont été autorisés, avec un plan de chasse: un premier comptage a lieu en février-mars, puis un second en août pour évaluer l’importance de la reproduction. Il est à noter que si la chasse ferme début décembre, les chasseurs conservent le droit, par arrêté préfectoral, de faire chasser leurs chiens jusqu’à la fermeture générale, début janvier. Dans ces conditions; malgré les difficultés inévitables au début, les chasseurs locaux se sont rapidement motivés face à une expérience qui leur permettait de ne pas renoncer totalement aux plaisirs cynégétiques, tout en reconstituant une population naturelle de qualité.
Le retour des perdrix
En 1993, dans l’Hérault, les chasseurs de I’A.C.C.A. de Pailhès sont confrontés à une raréfaction de la perdrix rouge. Le territoire représente 600 ha, moitié vignes, moitié friches, avec une population de 50 chasseurs. Grâce aux encouragements et au soutien technique de la Fédération des Chasseurs, puis de l’O.N.C., un plan de chasse est mis en place pour l’ensemble du petit gibier sédentaire. Aucun lâcher de tir ou de repeuplement, n’intervient. Une évaluation des populations est réalisée chaque année en mars, par des battues à blanc, et le territoire fait l’objet d’aménagements spécifiques: 6 ha. de culture à gibier, 45 points d’eau (abreuvoirs en ciment ou bidons plastique équipés de chasses d’eau), des agrainoirs et des abris contre les intempéries. Aujourd’hui, la population de perdrix est passée de 3 couples/100 ha. à 12 couples. Le lièvre, très rare au début, est remonté à 54 animaux./100 ha. et le tableau de lapins, malgré une limitation des prélèvements à 3 par jour et par chasseur - 2 cette armée pour cause de maladies - se situe, bon an mal an, entre 500 et 1000 pièces. Pour M. Armengol, le Président, ce succès est avant tout dû au soutien financier de la FDC., ainsi qu’à la collaboration technique entre celle-ci et l’ONC. Le plus difficile a certainement été de convaincre les chasseurs de l’opportunité de cette gestion face à la solution de facilité qui consistait à faire des lâchers d’oiseaux de tir. Mais les choses ont été facilitées par la pénurie croissante de petit gibier, le grand gibier restant assez rare sur le territoire, et surtout par l’arrivée d’une génération de “jeunes chasseurs”(45-50 ans) plus motivée et entreprenante. Seul regret: les subventions promises par l’État dans le cadre d’une étude agri-environnementale, reconnue par la Communauté Européenne, n’ont toujours pas été débloquées…
Faisans, un pari réussi
Dans la Vienne, dans les années 90, la Fédération des chasseurs avait organisé un sondage auprès des A.C.C.A. du département afin de voir quelles étaient leurs possibilités en matière de gestion du petit gibier. Cette initiative s’est concrétisée sur les L’A.C.CÀ. de Saint-Pierre de Maillé et d’Arçay. Des volières anglaises, destinées à reconstituer les populations de faisans sans recourir au gibier de tir, ont été mises en place.
À Saint-Pierre, sur un territoire de 4000 ha (140 chasseurs), deux volières, financées par la FDC ont été installées en 97 et 98; chacune permet de relâcher 500 faisans, dont la moitié est financée par la fédération. La moitié des oiseaux provient de la souche INRA, produite à Tours par JM. Meslin, et donne d’excellents résultats en terme de reproduction. Malgré l’absence d’aménagements spécifiques et des difficultés liées au contrôle des prédateurs - le renard n’est pas classé nuisible sur la commune et les rapaces sont, comme partout, protégés - Mme Richefort, la présidente, nous faisait part de la réussite d’ensemble: chaque chasseur a droit à 2 faisans et 4 perdrix par jour de chasse, et la majorité est satisfaite de la situation, les bons résultats aidant. Pour elle, il faut convaincre les chasseurs du bien-fondé des mesures prises, notamment en préparant l’Assemblée Générale annuelle, et en s’appuyant sur un noyau solide de chasseurs motivés. Seul regret: la réglementation agricole actuelle ne permet pas de bénéficier d’une aide efficace de la part des agriculteurs qui seraient prêts à contribuer à l’expérience, mais sont prisonniers de leurs textes réglementaires.
Un tableau doublé
Tableau semblable dans un autre secteur, sur le territoire d’Arçay (1100 ha pour 70 chasseurs environ). Une volière anglaise a été Installée il y a 4 ans, afin de restaurer des populations naturelles en l’absence de lâchers de tir. Le plan de chasse sur l’ensemble du petit gibier est défini après un comptage effectué en mars. Il s’élève à 2 faisans et 3 perdrix par jour de chasse et par chasseur plus 1 lièvre les dimanche et Jours de fête. Le tableau cette année s’élève à 4 faisans, 5 perdrix et près de 2 lièvres par chasseur. Pour le président, M. Tessrault, la grande difficulté provient du voisinage avec des territoires où les lâchers de tir sont toujours pratiqués, ce qui déséquilibre les prélèvements. Il s’implique par ailleurs dans une action de regroupement d’A.C.C.A. et de chasses privées afin de restaurer les populations de perdrix grises sur une superficie de 10000 ha Les sociétés participant à l’expérience prendraient des engagement en matière de gestion, et bénéficieraient de lâchers de reproducteurs au prorata de la surface des territoires.
À suivre...
Ces exemples démontrent que la diminution du petit gibier n’est pas une fatalité et que, dans des contextes différents, une structure aussi décriée que l’ACCA permet d’y remédier durablement. Toutes les expériences relatées présentent des points communs: refus du gibier de tir, contrôle des prélèvements, soutient technique et financier des Fédérations... La fermeture totale de la chasse, peu efficace, n’a jamais été imposée afin de conserver la motivation des chasseurs. En bref, les recettes existent, il ne reste plus qu’à les généraliser!
Gilles Tournier
« La diminution du petit gibier
n’est pas une fatalité et les
ACCA, tant décriées, permettent d’y remédier »
Quel que soit le petit gibier (faisan, lièvre ou perdrix), une gestion raisonnable et responsable a démontré et démontrera encore que les ACCA ont un rôle prépondérant à jouer dans ce domaine.