Sciences ornithologie.
Une étude du Muséum montre une baisse de 10% des effectifs.

MAIS OÙ SONT PASSÉS LES OISEAUX?

Par Raquel AZRAN - 27 avril 2002  Libération

 
 
L'hirondelle de fenêtre, oiseau de mauvais augure ? Avec des effectifs en baisse de 84 %, elle est emblématique du déclin de nombreux de ses congénères. Après treize années d'un programme de « suivi temporel d'oiseaux communs » (S.T.O.C), les chercheurs du Muséum d'histoire naturelle Romain Julliard et Frédéric Jiguet publient une première série de résultats : Toutes espèces confondues, les effectifs ont chuté de 10 %. Une tendance déjà observée en Allemagne, Angleterre et aux Pays-Bas, qui masque une réalité contrastée. STOC a été lancé en 1989 par le Centre de recherches sur la biologie des populations d'oiseaux du muséum.

Vingt-sept espèces présentent une diminution continue et parfois spectaculaire de leurs effectifs. Le pouillot siffleur voit sa population diminuer de 73 %. Viennent ensuite la linotte mélodieuse (-62 %), la pie bavarde (-61 %) et la mésange nonnette (-59 %). Le pigeon colombin déserte nos forêts (- 56 %), et la perdrix disparaît peu à peu des plaines agricoles (-49 %). Même le cri du coucou se fait plus rare (-28 %). L'étude montre aussi que quatorze espèces présentent une baisse importante, en dépit de variations interannuelles très prononcées. Un phénomène sans doute conjoncturel, selon les chercheurs, même si « certaines espèces ont tendance à fluctuer naturellement, car elles dépendent plus que d'autres de ressources alimentaires spécifiques, ou sont plus sensibles aux changements climatiques », explique Romain Julliard.

Agriculture. Quarante espèces affichent une population stable. A l'opposé, huit espèces seulement connaissent une croissance importante ; parmi elles, la tourterelle turque (+ 188 %); quant au rouge-gorge, qui affiche une hausse de 79 %, il retrouve la forme et ses effectifs après les hivers rudes des années 1985, 1986 et 1987. « Les espèces spécialistes d'un milieu ont davantage tendance à la baisse que les espèces généralistes, ce qui suggère que les causes de cette baisse sont plus liées aux changements du milieu et à l'intensification de son exploitation (pour l'agriculture par exemple), qu'aux changements climatiques », analysent les chercheurs. Y a-t-il un risque de voir certaines de ces espèces devenir « rares » ? « Ce n'est pas exclu. Nous en avons eu des exemples en France sur le siècle écoulé, et, en Angleterre, le moineau friquet est passé d'espèce abondante à espèce locale en trente ans », s'inquiète Romain Julliard. « Il faut continuer à surveiller ces oiseaux et engager une réflexion sur le développement durable, puisque leur déclin est lié à l'habitat », renchérit Frédéric Jiguet. Certains résultats sont à prendre avec précaution. D'abord, l'étude ne s'étale que sur treize ans, une durée courte pour ces observations. Ensuite, le programme Stoc a été privé de coordination nationale entre 1995 et 2000. Seuls le Nord-Pas-de-Calais, l'Auvergne et la Normandie ont continué de recueillir des données durant cette période.

Tendance anglaise. « Même si ces données ne permettent qu'une évaluation régionale des tendances, elles restent le seul miroir de la situation nationale. C'est sûr qu'il ne s'agit pas d'une bonne estimation, toutefois, elle reflète bien la tendance anglaise », précise Romain Julliard. Enfin, il est malaisé de « compter » des oiseaux communs, répandus par plusieurs centaines de milliers et vivant dans un grand panel d'habitats.

Même si deux techniques de comptage ont été mises au point, elles ne peuvent être fiables à 100 % : rien n'exclut, lors de l'observation, qu'un même oiseau ne sera pas comptabilisé plusieurs fois. Mais « le protocole étant identique d'une année sur l'autre, nous avons statistiquement le même taux d'erreurs, et cela n'introduit aucun biais puisque nous nous intéressons à des variations. L'essentiel est l'évolution des populations », disent les chercheurs. Quant au choix des observateurs, « nous prenons des gens stables, dont on connaît les méthodes », confie Théophane You, coordinateur du programme Stoc en Vendée. « L'avantage c'est que ce suivi ne demande pas beaucoup de temps, deux matinées par an seulement ».

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MIGRATION ET SURVIE DES ESPECES GIBIERS

La "gestion rationnelle" des populations migratrices sauvages exploitées par l'homme, nécessite de connaître l'importance des stocks, leur origine géographique, leurs déplacements migratoires ainsi que leurs paramètres démographiques tels que la mortalité.
Si les données accumulées chez les oiseaux permettent de répondre en partie à ces questions, il reste le problème non résolu de savoir si les prélèvements s'additionnent ou se superposent à la mortalité naturelle. Pour l'instant et plus modestement, il s'agit de suivre à biais constants l'évolution temporelle du comportement migratoire et de la survie des espèces gibiers.

QUESTION POSEE

Le comportement migratoire (origine géographique, calendrier, etc.) et la survie annuelle des populations (françaises ou étrangères) soumises à des prélèvements cynégétiques varient-ils à moyens termes ? Pratiquement, peut-on prouver que les prélèvements mettent en danger l'avenir des populations chassées ?

NATURE DES INFORMATIONS NECESSAIRES

- sexe/âge/poids (structure et état physiologique des populations)
- baguage/reprises publiques (variations de survie des répartitions spatiales)
- mesures de la quantité d'oiseaux prélevés et de leurs caractéristiques (essais d'utilisation des techniques de captures-recaptures et non plus seulement des reprises publiques). L'obtention de ce type d'information est à préciser avec l'Office National de la Chasse disposant du personnel adéquat.

PROTOCOLE

Il est simple : capture et baguage traditionnel. Pour ce thème reposant sur les reprises publiques, le plus grand nombre d'oiseaux bagués reste un objectif. 

ESPECES

Les espèces concernées sont : la Caille des blés ; le Râle d'eau, la Gallinule poule-d'eau, la Bécasse des bois(*), la Bécassine des marais, la Bécassine sourde, le Vanneau huppé, le Pluvier doré, le Pigeon ramier (baguage au nid fortement recommandé), le Pigeon colombin, la Tourterelle des bois, la Tourterelle turque, l'Alouette des champs, le Merle noir, la Grive litorne, la Grive draine, la Grive mauvis, la Grive musicienne, le Geais des chênes, la Pie bavarde, le Corbeau freux, la Corneille noire et l'Etourneau sansonnet.
(*) La bécasse est largement suivie par des équipes spécialisées de L'O.N.C. Nous encourageons les partenariats locaux entre ces équipes et les bagueurs intéressés.

REMARQUES

- L'Alouette des champs est également étudiée en migration nocturne post-nuptialle selon un protocole particulier ;
- Quand c'est possible (disponibilité des bagueurs et populations locales suffisamment importantes), un suivi selon le protocole SPOL est largement encouragé.
- Les expériences de chacun pour capturer efficacement telles ou telles espéces seraient profitables à tous. Partagez votre expérience sur la mailing-list bagueurs !